Je suis
né dans le département de la Mayenne, ma
famille est venue s’installer en Charente
après la grande guerre, je n’étais pas très
grand à cette époque et je ne m’en souviens
pas, mon père était agriculteur.
J’ai appris à lire, écrire et compter dans
la petite école communale du village
jusqu’au certificat d’étude.
Quand j’ai quitté l’école j'ai travailler
dans la ferme avec mes parents, j’ai suivi
un apprentissage dans ce métier et obtenu le
certificat d’aptitude professionnel
agricole.
En 1965 je suis parti faire mon service
militaire, obligatoire a cette époque.
C’est au retour dans la vie civile que j’ai
vraiment commencé ma carrière, au début chez
un patron à l'agriculture mais je me suis
rendu compte que ce métier ne me plaisait
pas, j’ai donc cherché un autre travail et
suis devenu chauffeur routier après avoir
passé le permis poids lourds.

Le dernier camion de ma carrière.
Au début, je faisais des petits trajets et des livraisons
régionales sur les départements Charente, Charente Maritime, Haute
Vienne et Dordogne, je rentrais tous les soir a mon domicile, mais
j’avais toujours envisagé de faire des grandes distances pour voir
les régions que je ne connaissais pas, c’est ce qui m’attirait
dans ce métier, j’aimais aussi conduire.
Ensuite est venu le temps de faire ses preuves sur la grande
distance, au début
j'effectuais un trafic
régulier entre mais la Charente et la Bretagne, avec un autre chauffeur expérimenté qui
ma
appris comment circuler en toutes prudence, comment descendre
une pente à fort pourcentage sans faire chauffer les freins du
véhicule, avoir du respect envers les
clients, la marchandise, et aussi a
respecter les autres usagés de la route.
Il n’y avait pas d'autoroutes comme aujourd’hui, alors il fallait apprendre a
partager la route ainsi que les grandes avenues des villes que
nous traversions, respecter les piétons, et surtout ne pas
s’énerver en cas d’embouteillage en ville, il n’y
avait pas les déviations partout comme aujourd’hui, nous devions
traverser les villes.
Après plusieurs voyages, je suis parti seul et j’ai dû apprendre a
me débrouiller, cela c’est très bien passé, puis j’ai changé de
destination, j’ai fait une ligne régulière entre Charente et
Normandie, j’étais heureux de pouvoir aller a Rouen et Le Havre,
voir ces gros paquebots dont j’avais entendu parler, mais que je
ne connaissais qu’en images jusqu'à ce jour, je livrais
fréquemment les hangars du port, ce qui ma permis d’approcher le
paquebot France de l’époque, que c’était beau pour moi qui
n’avais jamais voyagé, la route était plus longue, avec beaucoup
de villes a traverser, je devais traverser.
Je commençais a
livrer a partir de Chartres, ce n’était que des petits lots,
j’avais en moyenne six a huit points de livraisons, j’étais
contents d’avoir fini le soir et de
retrouver les habitués de la
ligne pour prendre le repas ensemble au restaurant, nous étions
une équipe régulière a nous retrouver dans ce
même restaurant, ensuite nous allions nous reposer pour reprendre
une cargaisons pour revenir au départ, la semaine débutait le dimanche soir pour se terminer le
samedi, souvent après midi, j’ai travaillé dans cette entreprise
pendant quatre années mais je n’aimais pas ce genre de voyages
réguliers, toujours la même route, les mêmes clients, je voulais
voyager, voir d’autres horizons.
Je suis donc parti dans une entreprise qui pratiquait les
transports internationaux, il faut dire que je suis un peu du
genre aventurier, que la solitude ne me
déplait pas, l’Espagne,
l'Italie, l'Allemagne, la Belgique et les Pays-Bas étaient mes
destinations les plus fréquentes dans mes début en international,
il fallait apprendre a passer les frontières, toujours vérifier
qu’il ne manque pas de documents pour les douanes, il y avait
aussi la barrière de la langue, mais on faisait avec les moyens du
bord, ce genre de travail m’a beaucoup plu, je pouvais voyager
sans faire toujours les même itinéraires.
Il y avait entente et respect entre les chauffeurs et les
employeurs, ce qui c'est perdu et c’est
bien dommage, nous les routiers de cette époque, nous formions
comme une une grande famille.
De cette vie de chauffeur, je garde en mémoire de multiples
souvenirs, des bons et des moins bons, mais j'ai essayer d'oublier
les mauvais pour ne conserver que le bon, je suis parti à la
retraite avec la tête pleine d'images de paysages superbes, des
souvenirs de très bons moments passé sur la route, grâce a ce
métier
j'ai visité des pays que je n'aurai jamais vus, faute de
moyens
financiers, bien sur j'ai certainement manqué beaucoup de choses
intéressantes, avec un poids lourds on ne peut passer que sur les
grands axes, alors ont ne voit que le paysage alentour, mais pas
les monuments, quand je passais un dimanche sur la route, c'était
très souvent, j'en profitais pour faire une visite plus
approfondie des villes, je prenais un taxi qui me conduisait en
centre ville, de plus que ces gens connaissent les beaux monument
a voir et a visiter, et aussi les bon restaurant pas trop onéreux,
il n'était pas rare de se retrouver a plusieurs chauffeurs pour
aller faire une promenade en ville, et surtout prendre des
photos pour ramener à la maison, j'en ai un stock très important
des nombreux pays que j'ai traversé, des photos de villes et des
paysages, il y a tellement de belles choses a voir, ce sont des
photos sur papier.
J’ai fait connaissance de ma femme et nous nous sommes marié en
1976, elle connaissait ma passion pour mon métier et en a
accepté les contraintes qui nous
sépareraient toute la semaine,
voir plusieurs dimanches hors du domicile, les voyages que je
faisais ne permettaient pas un retour en fin de semaine, mais nous
avions appris a nous connaitre, et elle avait pris l'habitude
de vivre seule, elle habitait chez ses parents, mais elle avait
décidé de partager ma vie, maintenant
nous sommes ensemble tous les jours mais elle a dû élever les
enfants seules, je ne les ai pas vu grandir, elle a dû assumer
seule leur éducation et gérer le budget du ménage, nous n’étions pas riche mais elle savait
gérer le
budget, nos enfants ont tous une situation aujourd’hui, ils ont
été élevés dans le respect du travail et des gens qui les
entourent.
J'ai fait ce métier par amour de la route mais il ne m'a pas
beaucoup laissé profiter de la vie de famille, j’en connaissais
les inconvénients et je les ai acceptés, je souhaite que les
personnes qui comme moi, aiment ce métier puissent encore le
pratiquer dans de bonnes conditions, malgré qu’il faille beaucoup donner, on a le plaisir de voyager et
de rencontrer des personnes différentes chaque semaine.
Le matériel a beaucoup évolué: les cabines sont devenues plus
confortables, équipées
de frigo, de télévision, de couchette confortable et d’un
chauffage autonome pour la nuit, on y dort aussi bien que dans une
chambre.
Les routes ont elles aussi suivi le progrès, tous les restaurants sont
équipés
de douches, les camions possèdent le téléphone depuis longtemps ce
qui est appréciable : le soir après le travail c’est rassurant de
pouvoir parler avec sa famille.
A mes amis routiers je souhaite une bonne route, la prudence et
aussi d’avoir, comme moi, la chance de faire une carrière sans
accident de la route, malheureusement j’ai fait une chute du haut
du camions, j'ai perdu l'usage de la jambe gauche et j'ai fini ma
carrière sur un poste de travail aménagé avec un véhicule équipé
d'un embrayage automatique, je faisais du régulier, chargement et
déchargement a quai, maintenant je suis a la
retraite, je ne me déplace qu’avec des cannes, mais
la vie continue...
Ce récit a été écrit par Papy16 en novembre 2004
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